Une pièce ronde, plongée dans une obscurité quasi-totale. Par les deux fenêtres à carreaux filtre la lumière de la lune, ou bien est-ce celle de l'aube ? Ses vêtements de la veille sont posés, bien pliés, sur le petit banc au bout de son lit. Les deux valises sont restées près de la porte. L'oreiller est bien rembourré, il n'a pas l'habitude d'avoir d'avantage que son manteaux sous la tête, il a l'impression que sa nuque est trop inclinée. Il tire sur une plume qui sort du coussin, puis sur une autre. Les elfes du château n'aimeront surement pas retrouver un tas de plumes en faisant la chambre le lendemain matin. Il s'arrête et cherche autre chose à examiner. L'édredon est agréable, il est frais, moelleux et épouse parfaitement sa position. Il vérifie. Il se met sur le dos, sur le ventre, côté gauche, côté droit, une jambe dessus, les deux jambes dessous. La température de la pièce est idéale, ni trop chaude ni trop froide, il n'a même pas eu besoin d'allumer un feu. Quand il eu fini d'examiner le moindre grain de poussière de la pièce, Lazare dû bien le reconnaître : il n'arrivait décidemment pas à dormir. Il aurait dû pourtant. Et comme une masse ! Il était arrivé à Poudlard aux alentours de minuit, directement du Mexique. Le transplanage étant impossible dans l'enceinte de l'école, il avait donc pris un Portoloin douteux à Mexico qui l'avait jeté - et c'est bien le mot ! - à Pré-au-Lard, le laissant faire l'escalade jusqu'au château de nuit, et à pied. Arrivé à Poudlard, McGonagal s'était longuement entretenue avec lui, s'assurant d'abord qu'il avait fait bon voyage et qu'il avait dîné, puis elle avait pris des nouvelles de ses pérégrinations et d'une connaissance vivant au Perou. Elle lui avait donné son emploi du temps pour l'année et semblait hésiter à aborder des sujets plus sérieux, mais y avait finalement renoncé, se disant qu'une bonne nuit de sommeil ne serai pas de trop avant d'évoquer l'objet délicat de sa réquisition à Poudlard.

Une elfe de maison l'avait conduit à ses nouveaux appartements dans le plus grand silence, même si elle lui adressa un doux sourire quand il s'inclina pour lui souhaiter bonne nuit. Il avait parcouru des milliers de kilomètres, avait marché plus d'une heure dans le noir, avait soutenu un entretien avec la directrice de Poudlard, et pourtant, il n'arrivait toujours pas à dormir plus d'une demi-heure par ci, par là. Le changement d'air ? L'appréhension de son retour ? Les interrogations sur ce qui se tramait entre les hauts murs du château ? Le malaise de se retrouver dans une chambre qui n'était pas la sienne ? Non. Lazare n'était ni intrigué, ni mal à l'aise, il était excité comme une puce. Dans quelques heures, il ferait la surprise de son retour à sa meilleure amie. Elle allait le tuer pour ne pas l'avoir prévenu dans sa dernière lettre, c'était certain, mais ça en valait la peine. A l'idée de la tête qu'elle fera, Lazare se met à rire comme un idiot dans son lit. Quelle heure est-il ? 6h30. Impossible de faire le mort plus longtemps. Il se lève et s'étire longuement. Après avoir fait sa toilette, il descend directement aux cuisines. Le petit déjeuner est servi dans la Grande Salle mais il n'a pas envie d'être présenté à ses collègues la bouche pleine et le nez enfariné. Un grand verre de jus d'orange, deux tranches de pain - confiture et trois tasses de thé plus tard, Il est enfin temps de faire sa grande entrée.

Lazare sort du château et traverse le parc en direction du terrain de Quidditch. Connaissant Rose, elle doit déjà y être. La pente est glissante, il manque de trébucher plusieurs fois sur l'herbe humide de rosée. Enfin, il l'aperçoit. Au bout du terrain, le nez plongé dans une malle de matériel plus grande qu'elle, elle sort des balles d'un geste rageur. Lazare en sautillerait d'impatience, mais non, il ne faut surtout pas qu'elle remarque à quel point il est heureux de la voir, elle en profiterai. Il ravale son sourire - difficilement, celui-ci faisant trembler les commissures de ses lèvres pour s'imposer à nouveau sur son visage - et se redresse, les mains jointes dans le dos. En silence, il avance jusqu'à être à trois mètres derrière elle. D'ici, il peut l'entendre marmonner dans sa barbe des propos inintelligibles mais de toute évidence peu élégants.

"Mmmh... McGonagal a bien fait de te garder. On ne peut pas laisser une sauvage comme toi errer dans les rues en toute liberté !"

Rose s'est figée sur place. Impossible d'empêcher d'avantage son grand sourire de remonter à la surface.

©Aloysia